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Faiblesses et enjeux du mix électrique tunisien

Si la Tunisie parvient aujourd’hui à assurer tant bien que mal l’approvisionnement en électricité de sa population, le manque de ressources fossiles et une gestion de la politique énergétique contestable, imposent aujourd’hui des réformes. L’électricité coûte cher, trop cher au gouvernement qui importe du combustible en quantité considérable et ne profite pas de son potentiel en énergie renouvelable. Une tendance que la Tunisie devra inverser si elle veut garantir dans l’avenir un approvisionnement de qualité à des tarifs abordables et pourquoi pas, acquérir son indépendance énergétique.

Un mix électrique dépendant du gaz naturel

La Tunisie s’appuie à 98,4 % sur les combustibles fossiles, et particulièrement sur le gaz naturel, pour produire l’électricité nationale alors que ces gisements sont bien plus modestes que ceux de ses voisins algérien ou libyen par exemple. En effet, si le gaz naturel était par le passé une ressource abondante, ce n’est plus le cas aujourd’hui et le gouvernement tunisien est désormais dans l’obligation d’importer 48 % de gaz algérien.
Un vrai handicap pour le pays lorsque l’on sait que le prix du gaz a quintuplé en l’espace d’une dizaine d’années en Tunisie et que l’Etat subventionne la filière en continu afin de garantir un prix accessible pour les consommateurs. Cette subvention pour les produits pétroliers a quintuplé entre 2010 et 2012 et représente aujourd’hui plus de 10% du budget de l’Etat et 4% du PIB.
Une situation qui paraît donc intenable sur le long terme et qui pose la question de la gestion énergétique du pays. Comme le souligne à ce propos l’expert tunisien en énergie, Lotfi Briki, « la Tunisie ne souffre pas d’une pénurie de ressources énergétiques, mais plutôt d’une mauvaise gestion énergétique, vu que notre pays ne dispose pas d’une politique nationale pour la promotion des énergies renouvelables ». « En Tunisie, toute augmentation d’un dollar du prix du baril de pétrole pèse lourdement sur la communauté nationale, puisqu’elle engendre un surcoût sur le budget de l’Etat de l’ordre de 40 millions de dinars ».
Le développement d’une véritable politique énergétique tunisienne dans le but de rééquilibrer ce mix électrique devra donc passer selon Lofti Briki par un recours accru aux énergies renouvelables adaptées au climat tunisien. Le mix renouvelable qui regroupe l’hydraulique, l’éolien et le solaire photovoltaïque ne représente actuellement que 1, 6 % de la production d’électricité globale du pays.

Une consommation électrique en augmentation constante

Dans le même temps, la Tunisie est confrontée à une augmentation constante de sa consommation en électricité et particulièrement durant les périodes estivales. En effet, l’utilisation généralisée et intensive des climatiseurs pèse à ce jour fortement sur le réseau électrique tunisien qui prévoit entre l’été 2013 et 2014, une hausse du pic de la demande d’électricité de 11,3 %.
Les climatiseurs sont de plus en plus utilisés dans les secteur du tourisme, des services et des centres commerciaux d’une part mais également chez les particuliers. La population tunisienne présentait un taux d’équipement de 37 % en 2013 contre seulement 15 % en 2009. Une tendance qui a poussé le PDG de la Société Tunisienne de l’Electricité et du Gaz (STEG), Rachid Ben Daly, à conseiller à la population une consommation plus raisonnable de ces équipements, précisant que chaque degré de température additionnelle lors du réglage du climatiseur, permettrait d’économiser près de 7 % de la consommation électrique.
D’autre part, la STEG semble également s’engager pour plus de prévention. En effet, le directeur conseiller auprès du PDG de la STEG, Mounir El Ich a affirmé que plusieurs mesures importantes avaient été prises pour aider les clients et les grands consommateurs d’électricité à rationaliser leur consommation. Un changement de comportement qui parait indispensable si la Tunisie veut réduire la hausse de la consommation et parvenir à maîtriser les pics de consommation prévus pour cet été.

Le développement croissant des énergies renouvelables

Le PDG de la STEG, Rachid Dali se veut toutefois rassurant. Comme il a déclaré lui-même le mardi 8 juillet dernier, le problème du déficit électrique est définitivement réglé avec l’entrée en production de la station STEG Sousse-Sayala qui devrait « assurer un excédent énergétique » à la Tunisie.  Le seuil de consommation fixé à 3500 MW, pour cet été, n’a pas été franchi et la pointe de consommation électrique enregistrée pour le moment n’a pas dépassé les 3000 MW.
Un léger répit donc pour le gouvernement tunisien qui devra néanmoins entreprendre les réformes structurelles nécessaires au développement de ses capacités de production électrique. Les modes de vie évoluent, nos besoins en électricité s’accroissent toujours plus et celle nouvelle station pourrait très rapidement ne plus suffire.
Dans ce cadre, la Tunisie entend bien profiter de son potentiel en énergies durables. Trois parcs éoliens sont en cours de construction à Metline et à Kechabta pour une puissance cumulée de 200 MW, tandis que dans le cadre du projet TuNur, le gouvernement prévoit l’installation de centrales thermiques (CSP) pour une puissance de 2000 MW dans le désert tunisien. D’un coût de 20 milliards d’euros, la construction de ces centrales devrait s’étaler sur la période 2014-2020 pendant laquelle sera installée une ligne électrique terrestre et maritime d’une longueur de 1000 km permettant de relier le Sahara tunisien au réseau électrique italien.
Cependant, la part des énergies renouvelables dans le mix électrique tunisien est toujours très faible et ces projets, quoique prometteurs ne proposent actuellement pas de solution à moyen terme. De plus, si le gouvernement affiche un objectif de 30% d’électricité d’origine renouvelable à l’horizon 2030, rappelons tout de même que ces énergies coûtent cher et devront là encore être subventionnées.
Autre solution envisagée, la Tunisie semble disposer d’importantes ressources en gaz de schiste. Selon une étude de l’agence gouvernementale américaine d’information sur l’énergie (EIA), une zone très riche en gaz de schiste, appelée Bassin de Ghadamès, située entre l’Algérie, la Libye et le Sahara tunisien pourrait être exploitée. Si l’Algérie a déjà commencé à exploiter ce bassin, la Tunisie a entamé quant à elle une phase de réflexion et d’étude sur les moyens d’exploiter ce gaz tout en respectant l’environnement.

Crédits photo : Citizen59

Jamel Arfaoui
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