Accueilالاولىفي ذكرى وفاته : رسالة أحمد التليلي الى بورقيبة

في ذكرى وفاته : رسالة أحمد التليلي الى بورقيبة

يحي النقابيون يوم غد  ذكرى رحيل الزعيم النقابي أحمد التليلي وسيتحول  يوم غد السبت السيد الحسين العباسي الأمين العام للاتحاد العام التونسي للشغل على رأس وفد نقابي الى مقبرة الجلاز بالعاصمةلاتلاوة الفاتحة على روح الفقيد وستعقد مساء ندوة لتخليد الذكرى واستعراض مناقب الزعيم

وقد أرتينا بهذه المناسبة وتعميما للفائدة وخاصة لجيل الشباب اعادة نشر رسالة الراحل التي تعد أول تحد للزعيم بورقيبة حول مسألة الديموقراطية في تونس

 

في 25 جانفي 1966 أرسل أحمد التليلي رسالة من منفاه الإختياري بأوروبا الى الرئيس الحبيب بورقيبة وهذه  الرسالة مكتوبة باللغة الفرنسية  وقد رصد فيها الأزمة الإقتصادية والسياسية والإجتماعية التي تمر بها البلاد و جاء في مفتتحها (في الوقت الذي يمرّ فيه الشعب التونسي بفترة من أخطر فترات تاريخه يفرض عليّ الواجب ان ألح لديكم مرّة أخرى على مراجعة السياسة او على الأصح ودون إنفعال مراجعة طرق الحكم التي أردت بالبلاد اليوم في حالة من الخطورة تهدّد بجعلها في المستقبل القريب منسدّة الآفاق).

 

« Au demeurant, il est clair que le régime, pour se sauvegarder, semble de plus en plus compter sur d’autres moyens. C’est ainsi que les effectifs de l’armée ont plus que doublé par rapport à ceux du temps du protectorat. La police a plus que triplé pendant que la garde nationale a presque quintuplé en comparaison avec l’ex-gendarmerie française. A ces effectifs s’ajoute la contribution importante des fonds secrets de la Présidence, des Ministères de l’Intérieur et des Affaires Etrangères et autres sources y compris une partie des crédits de lutte contre le sous-développement utilisés par les Gouverneurs à des fins de renseignements.Mais cet appareil ainsi que les dépenses qu’il occasionne pèse très lourdement sur le petit pays qu’est le nôtre. Par l’activité qui en découle, il augmente le malaise d’un peuple qui a déjà prouvé sa capacité à se révolter contre un tel système et à le briser. Car, actuellement, tout citoyen, quelque soit son rang dans la société ou ses fonctions politiques, est étroitement surveillé par plusieurs polices qui s’affrontent dans une surenchère qui les oblige à inventer les renseignements. Les surveillances s’exercent de la façon la plus maladroite même dans les

[Lettre à Habib Bourguiba par Ahmed Tlili. Page 16]

ministères sur les hommes politiques et sur les techniciens, dans les organisations nationales et même dans le Parti. A l’Université où les agents pullulent, on pousse le zèle jusqu’à charger les étudiants innocents, dans la proportion de 1 sur 10, de se surveiller les uns les autres et d’épier les faits et gestes de leurs professeurs, ouvrant ainsi de tristes perspectives pour notre jeunesse montante. Dans les campagnes, les Gouverneurs omnipotents ont la haute main sur toute l’administration de la région, ils dictent leurs ordres indiscutables aux chefs de service locaux même aux techniciens auxquels ils se substituent en cas de besoin. Certains Gouverneurs se plaisent à entretenir cette guerre des polices et s’ingénient à créer la division parmi les populations en utilisant leurs propres réseaux de renseignements et en s’exerçant ainsi à développer leur habileté politique.

La pratique de ces méthodes policières qui n’ont aucun rapport avec la défense et la sécurité nationales, s’exerce contre les nationaux même à l’étranger et particulièrement en France, en Algérie et en Libye. La plus grande arme dans ce genre d’activité est le passeport auquel s’ajoute l’utilisation exagérée des fonds secrets. Le passeport est un droit constitutionnel dont bénéficie en principe chaque citoyen, il est souvent retiré ou refusé au gré des autorités administratives sur la base de faux renseignements fournis par les informateurs intéressés.

C’est ainsi que les étudiants, parfois voués à une carrière brillante dont le pays peut être bénéficiaire, se voient privés de leur passeport et empêchés de terminer leurs études commencées à l’étranger. Sur simple présomption, ils se trouvent ainsi brisés. Les victimes peuvent être des travailleurs qui perdent le gagne-pain de leurs familles à cause du retrait de leur passeport, à l’occasion du congé passé en Tunisie, parce qu’ils sont signalés comme n’étant pas orthodoxes par des agents sans scrupules.

Dans les trois pays susmentionnés, de véritables brigades de polices tunisiennes opèrent presque au grand jour, encadrant littéralement travailleurs, commerçants et étudiants. Ces derniers en souffrent le plus parce qu’ils sont non seule ment surveillés, mais aussi à cause de l’intervention constante de ces polices dans leurs affaires intérieures, intervention qui

[Lettre à Habib Bourguiba par Ahmed Tlili. Page 17]

se manifeste surtout lors des élections des sections de l’Union Générale des Etudiants en vue de truquer les votes ou d’intimider les jeunes électeurs, créant ainsi une atmosphère telle que les étudiants se trouvent acculés à se jeter aveuglément dans les mouvements extrémistes d’opposition les plus divers.

Des sommes considérables sont ainsi chaque année gaspillée sur les fonds des départements de l’Intérieur et des Affaires Etrangères au lieu d’être utilisées par les Ministères de l’Education Nationale et des Affaires Sociales à l’amélioration des conditions d’habitat des travailleurs et des étudiants, à la rétribution d’un nombre aussi grand que possible d’attachés culturels et sociaux s’occupant du sort de ces nationaux à l’étranger et enfin à la création d’oeuvres sociales en leur faveur.

D’une façon générale, ce système policier, si actif tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, n’a que des aspects négatifs, il accentue le mécontentement, au lieu de le résorber, par la multiplication des atteintes aux libertés. Aucun citoyen n’est aujourd’hui à l’abri d’une mesure arbitraire. Sur simple décision d’un gouverneur souvent mal inspiré, on est éloigné de sa résidence, ou envoyé au camp d’El Haouareb, sans qu’aucun compte ne soit tenu de la situation familiale ou matérielle de l’intéressé et sans même que soient examinés les aspects humains des conséquences d’une telle mesure. Le cas est moins dramatique quoique beaucoup plus fréquent, des fonctionnaires de l’Etat qui sont mutés d’office, dans les mêmes conditions, non pas sur la base de normes professionnelles, mais selon le bon plaisir des autorités administratives.

Le mal n’est pas circonscrit à ces seules limites, des arrestations sont fréquemment opérées sans ordre de la justice et restent souvent ignorées du public puisque la presse ne peut pas en parler. Ceci rappelle un peu les lettres de cachet d’une période célèbre de l’histoire de France. Les victimes, condamnées ou pas, restent au secret, et, dans beaucoup de cas, leurs familles restent dans l’ignorance de leur lieu de détention. Nos prisons ressemblent en cela aux fameuses oubliettes du Moyen-Âge. »

Jamel Arfaoui
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